dimanche 21 octobre 2012

Le dossier « Gabon 2009 » va s’alourdir à la CPI


Pour préparer le changement politique à venir et la redéfinition imminente des institutions au Gabon, toutes les pistes ont été minutieusement étudiées par les chantres de cette démarche de sorte que le vent de la Conférence Nationale Souveraine soit non seulement légitime mais surtout crédible.

Aussi, nous apprenons qu’une organisation non gouvernementale gabonaise, épaulée par d’éminents juristes gabonais, des experts africains et occidentaux en droit, est entrain de finaliser une plainte contre la présidence de la République gabonaise.

L’objet de cette plainte dont la recevabilité sera appréciée très bientôt par les juges de la Cour Pénale Internationale (CPI) fait suite à l’overdose d’articles de presse stigmatisant et incitant à la haine envers l’ethnie Fang du Gabon. Il faut rappeler que cette œuvre regrettable dénoncée est l’action répétée de Raphael Ntoutoume Nkoghe, un des conseillers d’Ali Bongo Ondimba, président de la République du Gabon.

En effet, de nombreux éléments de langage dangereux et récurrents démontrent les faits qui sont reprochés à ce conseiller en service à la Présidence de la République. Et, conformément au « Statut de Rome » dans lequel certaines dispositions qualifient la CPI pour les faits présentés, il serait impensable que cette demande puisse faire l’objet d’un rejet d’autant plus qu’il a été précisé que la justice du Gabon ne s’est jamais offusquée de cette dérive qui dure depuis un temps maintenant.  

Selon l’article 1 du Statut de  Rome de la CPI : « il est créé une Cour Pénale Internationale en tant qu’institution permanente, qui peut exercer sa compétence à l’égard des personnes pour  les crimes les plus graves ayant une portée internationale, au sens du présent statut. Elle est complémentaire des juridictions pénales nationales. Sa compétence et son fonctionnement sont régis par les dispositions du présent statut ».

Puis, selon l’article 4 du même statut de Rome de la CPI : « la Cour a la personnalité juridique internationale. Elle a aussi la capacité juridique qui lui est nécessaire pour exercer ses fonctions et accomplir sa mission. La Cour peut exercer ses fonctions et ses pouvoirs, comme prévu par le présent Statut, sur le territoire de tout Etat Partie et, par une convention à cet effet, sur le territoire de tout autre Etat ».

Au-delà de ces articles susmentionnés, ce sont les articles 5, 6 et 7 du Statut de Rome de la CPI qui ont motivé la plainte de cette ONG gabonaise se battant pour les droits de l’Homme.

L’article 5 du statut de Rome de la CPI stipule que : « La compétence de la Cour est limitée aux crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale. En vertu du présent Statut, la compétence de la Cour a compétence à l’égard des crimes suivants : a) le crime de génocide ; b) les crimes contre l’humanité ; c) les crimes de guerre ; d) le crime d’agression ».

Quant à l’article 6, il est clairement dit que « Aux fins du présent Statut, on entend par crime de génocide l’un quelconque des actes ci-après commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel ». Et ses points (b) et (c) de préciser respectivement: « (b) Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe et (c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ».

Et enfin, l’article 7 de stipuler que : « Aux fins du présent Statut, on entend par crime contre l’humanité l’un quelconque des actes ci-après lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque » quand ses points (h) et (k) précisent : « (h) Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sens du paragraphe 3, ou en fonction d’autres  critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour. (k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des  atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale ».

Au regard des éléments sus évoqués, on peut en effet comprendre le malaise social réel qui existe au Gabon et qui a atteint son paroxysme avec le « Tout Sauf les Fangs », ce slogan électoral déplorable qui avait ponctué et pollué l’atmosphère de la transition politique d’août 2009 après le décès brusque d’Omar Bongo Ondimba.

N’est ce pas enfin ce qui, au numéro 2701 du magazine panafricain « Jeune Afrique » du 14 au 20 octobre 2012 a conduit l’ancien premier ministre, Casimir Oyé Mba, suite à la question du journaliste Georges Dougueli : « certains espèrent aussi la répartition des postes en fonction de la région d’origine… », a déclaré que : « Cette pratique n’était pas si mauvaise. A l’origine, elle visait à éviter qu’une personne accède au pouvoir et le gère pour le bénéfice exclusif de son ethnie. Cela a marché, mais il y a eu des excès : un Fang n’a jamais été ministre des finances ni ambassadeur à Paris ou à Washington !».

Ces propos tenus par un des dignitaires et source autorisée du Gabon trouvent en effet une forte légitimité et une grande crédibilité lorsqu’ils sont accouplés aux « révélations » parues dans le livre « Lumière sur le Gabon » de Raphael Ntoutoume Nkoghe, actuel conseiller d’Ali Bongo Ondimba qui déclinait au chapitre « Tribalisation de l’Etat » l’occupation des postes les plus importants par l’ethnie et la province du président de la République.

Ce conseiller d’Ali Bongo Ondimba concluait d’ailleurs ses déclarations en affirmant: « Nous avons-là, le prototype même de ce qui est désigné ailleurs comme une armée mono ethnique ou mono parentale. Pour préparer le génocide rwandais, les extrémistes Hutus de feu Juvénal Habyarimana, n’ont pas procédé autrement. Car, concentrer ainsi toute la puissance de feu d’un pays entre les mains d’une seule ethnie ne consiste pas moins à programmer l’extermination d’une ou des autres ethnies. Davantage quand on n’est pas sans savoir que ces armes sont détenues par des individus dont l’inconscience, l’inconséquence, le repli identitaire, le réflexe régiono-provincial et la préférence tribalo-ethnique ont été démontrés plus d’une fois.

Il faut surtout comprendre ici qu’il ne s’agit pas seulement d’un souci de Bongo de confier à ses parents l’essentiel de l’armement du pays. En ce sens que cette répartition ethno-tribale obéit davantage à la conception clanique que Bongo se fait lui-même non pas de l’exercice du pouvoir, mais plutôt de sa conservation. Une conservation strictement limitée aux deux groupes ethniques dont il est issu : l’Obamba paternel et le Téké maternel. Ainsi, chaque entité gère équitablement une partie des forces de Défense et de sécurité du pays ».

Affaire à suivre…

Par Télesphore OBAME NGOMO  
   


    


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