jeudi 1 décembre 2011

Dynamique émergente sous-régionale : l’atout d’un premier ministre du Nord (2ème Partie)

Ce dossier spécial "Qui sont les vrais amis d'Ali Bongo" nous a été offert par la direction de la publication de l'hebdomadaire gabonais "Le Mbandja". Fin du chapitre 6
 
 TéodoroObiangNguemaMbasogo, nouveau matador pétrolier d’Afrique centrale, ne l’a pas toujours été. Officier supérieur formé à l’académie générale militaire « Francisco Franco » de Saragosse en Espagne dans le début des années 60 (1963), il destitua en août 1979 le président Francisco MaciasNguemaBiyogo, son parent de la tribu Essangui et devint le deuxième chef d’Etat de la Guinée-Equatoriale. Depuis 1968, date de son indépendance, obtenue après une farouche lutte nationaliste anticoloniale menée par Bonifacio Ondo Edou et Francisco MaciasNguemaBiyogo,  la Guinée-équatoriale a vécu dans une extrême pauvreté avant l’avènement de l’or noir survenu en 1995. 

Disposant d’une faible population et ne possédant pas de richesses alors, la Guinée-équatoriale a vu nombre de ses fils quitter le territoire national pour chercher ailleurs un bonheur qu’ils ne trouvaient pas dans l’ancienne colonie espagnole. Combien de vagues d’immigration provenant de la Guinée-équatoriale le Cameroun et surtout le Gabon durent essuyer pendant des décennies ? Pour survivre et élever sa famille au Gabon, l’immigré équato-guinéen était prêt à accepter des petits métiers, à assurer des basses besognes jugées humiliantes par les Gabonais. Ces derniers à cette époque, sûrs d’eux et dominateurs par le pétrole qui coulait à flot depuis 1973, ont longtemps traité avec condescendance leurs frères de Guinée-équatoriale. « Espèce d’équato ! » éructait-on parfois à l’endroit d’un équato-guinéen comme pour l’insulter. Il arrivait aussi que cette amabilité soit dirigée à l’endroit d’un Gabonais qui paraissait si misérable. Il n’était pas bon, au Gabon, d’être Equato-guinéen quand Malabo croulait sous la misère la plus infâmante.

L’histoire, non vérifiée, raconte avec force détails que le maître de Malabo faisait alors la manche chaque fin de mois auprès de l’émir gabonais pour que ce dernier lui ôte une épine du pied en payant la solde des militaires et parfois des fonctionnaires de son pays. De croustillants détails, bien que non attestés, affirment que le président équato-guinéen refusait, chaque fois, de s’asseoir aux côtés de son homologue gabonais lorsque ce dernier lui accordait une audience, préférant par respect quasi-obséquieux finir tout l’entretien debout !

Mais aujourd’hui, cette époque est bien révolue ! Depuis 1995, la Guinée-équatoriale est le 3ème producteur pétrolier d’Afrique noire devant le Gabon et le Congo-Brazzaville. Un ambitieux programme de réalisation des infrastructures de base est en cours pour l’émergence de la Guinée-équatoriale à horizon de 2025. Et les résultats sont bien visibles. Pour les Gabonais qui en doutent encore, car gardant en mémoire l’ancienne image pauvre de la Guinée-équatoriale,les villes de Malabo, Bata, Ebebiyin, Mongomo …sont prêtes à les accueillir pour leur montrer leurs nouveaux atours. La métamorphose est incroyable ! En l’espace de 15 ans seulement, la Guinée-équatoriale semble avoir rattrapé son retard en matière d’infrastructures de base. Mieux, le nouvel émirat pétrolier d’Afrique centrale bombe le torse et tient désormais à se faire respecter. Finie la Malabo misérable et méprisée, voici venue la grande, majestueuse et impériale Malabo qui entend dire son mot sur les sujets importants et tient à s’imposer. 

Lors du sommet de la BEAC (Banque des Etats de l’Afrique Centrale) tenu le 16 et 17 janvier 2010 à Bangui, Lucas AbagaNchama, homme rigoureux, ferme et autoritaire a été nommé gouverneur de cette institution par décision des chefs d’Etat. Ce ressortissant équato-guinéen occupe pour la première fois un poste réservé habituellement au Gabon selon le consensus du Fort-Lamy de 1973 et y remplace le Gabonais Philibert Andjembé dont l’image a été passablement écornée par le scandale financier de la BEAC révélé par le magazine Jeune Afrique en septembre 2009. Il faut préciser que bien avant la mort du patriarche Omar Bongo qui s’était toujours opposé à ce projet de rotation du poste de gouverneur, le président Obiang Nguema Mbasogo, initiateur de l’idée, revendiquait déjà ouvertement la tête de la BEAC pour son pays. 

Cette défaite cuisante du Gabon, marqua la première victoire éclatante du nouveau seigneur équato-guinéen.Malabo veut également rayonner : l’inauguration du parlement CEMAC, le 15 avril 2010, en présence des chefs d’Etat de la sous-région et entièrement financé par l’émirat pétrolier équato-guinéen ; lenouveau centre culturel francophone de Bata, financé en totalité par la Guinée équatoriale (5,5 millions €), a été inauguré le 8 décembre 2009 par Alain Joyandet, Secrétaire d’Etat chargé de la coopération et de la francophonie. La diplomatie offensive de Malabo est claire : l’Afrique centrale doit désormais compter avec elle et l’image ancienne de la Guinée-équatoriale pauvre et pitoyable doit complètement disparaître des esprits. Des moyens financiers énormes sont consacrés à cette vision politique.

Le conflit frontalier des îles Mbaniè et Corisco qui opposent le Gabon et la Guinée-équatoriale, révèle à suffisance le sentiment de revanche sur l’histoire que les frères équato-guinéens ressentent à l’endroit des Gabonais, anciens et méprisants bienfaiteurs. Désormais, ils sont dans la cour des grands, et sont prêts à supporter la rivalité, l’affrontement, chose impensable dans les années 80. Du 24 au 25 février 2011, sous l’égide de l’ONU (Organisation des Nations Unies), les deux chefs d’Etat se sont retrouvés à New-York en présencedu secrétaire général Ban Ki-Moon pour aborder le problème devant un tiers, pour la première fois. La question n’a pas été tranchée et les négociations se poursuivent.

Si le nouvel émir pétrolier d’Afrique centrale s’est toujours, jusqu’au bout, montré très respectueux, à l’endroit de feu Omar Bongo, qu’il assista à la mort de son épouse et fit le déplacement à Oyo au Congo pour l’inhumation, dont il vint rendre un dernier hommage à Libreville et à Franceville quand le président gabonais lui-même décéda, il est particulièrement remonté à l’endroit du successeur du président défunt qui n’a pas daigné faire le déplacement à Malabo lors de son investiture en décembre 2009, préférant poursuivre sa mission en Italie et déléguer le président de l’Assemblée nationale pour le représenter. 

Cette indélicatesse diplomatique du jeune président gabonais n’a pas du tout été appréciée par le président Obiang Nguema Mbasogo qui lui, avait pourtant bien fait le déplacement à Libreville pour assister deux mois auparavant à l’investiture d’Ali Bongo Ondimba. Les raisons de son absence à cette importante cérémonie ne manquaient cependant pas : une grave polémique diplomatique entre le Gabon et la Guinée-équatoriale avait vu le jour pendant la campagne présidentielle gabonaise où, selon les dires du journaliste Francis Salah-Ngouabeaud, l’homme fort de Malabo avait pris faits et causes pour le candidat André MbaObame, son frère Ntumu.

Comme on peut aisément le constater, les relations entre le doyen des chefs d’Etat de la sous-région et le jeune président gabonais ne sont pas des plus satisfaisantes, loin s’en faut ! Pourtant, une lueur pointe à l’horizon qui pourrait réchauffer les relations entre les deux hommes d’Etat : la Cocan 2012. Cet évènement continental et très médiatisé sera certainement dans leur carrière de chef d’Etat, l’unique qu’ils auront à organiser ensemble pour le plus grand plaisir des Africains amateurs de Football. Pour sa réussite les deux chefs d’Etat travaillent la main dans la main. Cela les rapproche, les rassemble. La nomination d’un premier ministre du Woleu-Ntem participerait au renforcement des relations entre les deux présidents en créant un meilleur climat de confiance, plus détendu, et plus enclin à permettre la dissipation des malentendus et surtout la résolution du conflit frontalier sus-évoqué. Rappelons qu’en son temps, le chef de l’Etat Omar Bongo s’appuyait sur le vice-premier ministre Ondo Methogo Emmanuel, originaire de Bitam dans le nord du Gabon, pour « fluidifier » les relations avec son homologue équato-guinéen. 

Excellent dans l’art relationnel politique, Omar Bongo Ondimba avait depuis compris l’intérêt qu’il trouverait à exploiter les canaux familiaux, tribaux ou ethniques entre les fils du septentrion et ceux de la Guinée-équatoriale qui partagent une même langue, une même histoire et une même culture. Le jeune président Ali Bongo Ondimba serait bien inspiré de prendre en compte cette efficace ficelle politique.
Dans sa politique d’émergence, Ali Bongo Ondimba a mis en valeur la diplomatie offensive avec pour leitmotiv « le nouveau visage du Gabon » : plus économique, plus dynamique, tourné résolument vers le développement, moins orienté vers la résolution de conflits aux fins de prestige international. Le cap est clairement donné : le prima de l’économie sur la politique et la diplomatie nationale est désormais au service du développement économique de la nation gabonaise.

Sur cette base alors, il serait judicieux pour la stratégie diplomatique d’Ali Bongo à l’égard de ses immédiats voisins du nord de considérer deux paramètres très importants : primo, le Cameroun est la première puissance économique de la sous-région d’Afrique centrale. Et secundo, la Guinée-équatoriale est devenue la première puissance financière de la CEMAC. Parce que l’économie est au cœur de sa politique d’émergence, le président gabonais gagnerait indubitablement à améliorer ses rapports avec Paul Biya du Cameroun et TéodoroObiangNguema de la Guinée-équatoriale. Un premier ministre du septentrion est pour l’heure, l’interface idéale à même de rendre plus étroits des rapports distendus par l’histoire. En outre, une complicité diplomatique des axes Malabo-Libreville et Libreville-Yaoundé serait de nature à mettre en œuvre une synergie inédite dans la dynamique émergente de la sous-région d’Afrique centrale.

Horus Den (Oudimou) ou  Ousaphaïs, pharaon de la première dynastie


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