Les dernières marges de manoeuvres d'Ali Bongo Ondimba
Un
proverbe populaire français enseigne que « tous ceux qui ne connaissent pas
l’histoire s’expose à ce qu’elle se répète ».
Si
Joseph Désiré Mobutu avait compris que ce qui était arrivé à Jean Bedel Bokassa
aurait pu lui arriver quelques années après, il aurait réfléchi par deux fois
avant de poser des actes qui n’allaient pas dans le sens du bien être du
peuple. Il en était de même pour Pascal Lissouba qui avait pourtant accueilli
Joseph Désiré Mobutu tandis qu’il était en fuite. Hélas, au regard de sa
situation actuelle, on peut affirmer qu’il n’avait pas bien analysé les raisons
qui avaient conduit cet homme à fuir la terre de ses ancêtres. C’est pourquoi
aujourd’hui il semble être condamné à vivre ses derniers jours loin de son pays
comme Mobutu qui avait été inhumé lors de sa terre natale qu’il disait tant
aimé.
Si
Ben Ali, Hosni Moubarak, Mouammar Kadhafi avaient compris que seuls le
dialogue, l’humilité, la tolérance, la démocratie, la bonne gouvernance et
l’alternance garantissent une fin heureuse comme celle de Nelson Mandela ou d’Abdou
Diouf, ils n’auraient jamais connu une fin de règne aussi pathétique que
dramatique vécue récemment.
Toujours
en Afrique, le 11 septembre 2012, les rebelles du M23 ont appelé Joseph Kabila,
président de la République Démocratique du Congo (ex Zaïre) au dialogue. Malheureusement,
ce dernier, dans une arrogance injustifiée du fait de son élection contestée et
problématique, s’est montré imperturbable. La réalité aujourd’hui est qu’il ne
peut gouverner paisiblement son pays comme le fait actuellement Macky Sall du
Sénégal.
Idem
pour François Bozizé, président de la République de Centrafrique qui s’est
refusé la légitimité acquise démocratiquement par Mahamadou Issoufou du Niger.
Aujourd’hui, il se retrouve nez à nez avec les rebelles qui ne lui laissent
plus que trois ultimes choix : négocier une porte de sortie comme ce fut
le cas pour Daddis Camara, être débusqué comme un rat comme cela s’est observé
avec Laurent Gbagbo ou mourir comme un vulgaire animal tels que le général
Robert Gueï ou Mouammar Kadhafi?
Devant
ce spectacle déplorable pour la situation du peuple centrafricain, il convient
de dire que François Bozizé n’avait pas bien compris que le changement s’était pour
maintenant et qu’il s’était imposé à l’Elysée le 06 mai 2012. Et mieux, ses
conseillers et lui n’avaient non seulement pas bien lu le discours du Bourget
de François Hollande, mais également, ils n’avaient pas bien apprécié les
paragraphes de son programme de campagne qui faisaient allusion à sa politique
en Afrique et en plus s’étaient certainement refusé d’apprécier à juste titre
son interview avec les journalistes de France 24, TV5 Monde et RFI. Or, cet
échange résumait parfaitement toute la nouvelle politique africaine que l’Elysée
entendait désormais mener.
Dans
ce tourbillon médiatico-politique, il faut dire qu’Ali Bongo Ondimba aurait
quand même eu beaucoup de chances car, il a au moins eu l’opportunité de voir
ce qui est arrivé à ses pairs qui ont refusé le dialogue et qui n’avaient pas
bien mesuré la nouvelle donne des partenaires stratégiques que sont la France,
les Etats-Unis et l’ONU. Ces derniers, vivant une crise sans précédent, ont
tout intérêt à chasser du pouvoir des chefs d’Etat mal élus et corrompus qui
préfèrent traiter avec les pays asiatiques au détriment des pays occidentaux
soumis à des contrôles de gestion et des règles de plus en plus drastiques.
Après
avoir publiquement dit NON à la Conférence Nationale Souveraine qui était
pourtant la meilleure manière de sauver son personnage politique, Ali Bongo
Ondimba a lui-même déclenché le compte à rebours de la fin de sa présence au
sommet de l’Etat gabonais. Et ce ne sont pas ses sorties tonitruantes
injustifiables, comme ce fut le cas dans l’évocation de l’anglais comme seconde
langue au Gabon et ensuite jugée ridicule par ses propres mots, qui
parviendront à stopper le sablier déjà bien en marche. Mais bien au contraire.
Est-il
encore nécessaire de rappeler les injures incessantes et insensées faites aux
nouvelles autorités françaises, non seulement quand elles étaient dans
l’opposition mais également une fois confortablement assises au sommet de
l’Etat français ? Peut-on faire fi du renvoi incompris sinon capricieux
des 200 militaires français experts qui exerçaient dans notre pays au sein de
la Garde Républicaine ? Devrait-on s’affranchir de rappeler les nombreuses
promesses non tenues, notamment les fameux 5000 logements par an, ainsi que la
fortune colossale de plus de 700 milliards de francs cfa (soit plus d’un
milliard de dollar) mal acquise par Ali Bongo Ondimba en trois années
seulement à la tête du Gabon? Inutile de se demander ce que Maixent Accrombessi
et les siens auraient empoché au passage.
Autant
d’éléments qui permettent de démontrer qu’Ali Bongo Ondimba pourrait couler ses
dernières semaines à la tête de l’Etat s’il continue de refuser les priorités
et les volontés du peuple gabonais car, dans sa très grande majorité, le peuple
du Gabon n’accepte plus de subir ces conditions de vie misérable quand des gens
comme Maixent Accrombessi, issu d’aucune fortune connue ou reconnue au Bénin
brasse désormais nos milliards de francs CFA.
Il
est toutefois opportun de préciser que, dans plusieurs de ses interviews, Ali
Bongo Ondimba fait souvent référence à ce qu’il qualifie de délit de patronyme.
Une formule qui semble donner l’impression à ses concepteurs qu’ils friseraient
le géni intellectuel gabonais. Mais, ces derniers peuvent-ils nous assurer que
si Ali Bongo Ondimba s’était appelé, Bibang, Révignet, Moussavou ou
Madoulazokou, il aurait pu accéder au sommet de l’Etat ?
C’est
d’ailleurs l’occasion de clairement rappeler à ces chantres de la médiocrité et
de la collaboration que ce sont les piliers qui soutenaient le régime d’Omar
Bongo Ondimba, mort brutalement et brusquement, qui ont grandement favorisé
l’ascension politique d’Ali Bongo Ondimba.
En
effet, tout au long de son long règne sans discontinuité, soit 42ans au sommet
de l’Etat gabonais en qualité de président de la République, Omar Bongo Ondimba
avait instauré une gestion du pays sur la base de cinq piliers stratégiques.
Aussi, le premier pilier était composé de sa famille quand le cinquième pilier était
constitué par tous ses réseaux à l’international.
Ensuite, il y avait le second pilier qui était la gestion du pouvoir par son
clan (les tékés) quand le troisième pilier était symbolisé par le contrôle du
pouvoir via la province du Haut-Ogooué (G2). Et enfin, dans le quatrième
pilier, il avait fait le choix de canaliser les énergies, quelques fois
débordantes, de la masse par le biais d’une intégration intéressée et
divertissante dans le Parti Démocratique Gabonais (PDG) et une cooptation de
l’élite par un passage téléguidé sous le bandeau de la soumission et de la
corruption.
Devant
un tel maillage du système de gouvernance ou de la chaîne de décision, il était
quasiment impossible que cela ne fusse un des siens qui puisse lui succéder. Ce
qui fait que, ces piliers ayant été mis en lambeau par les bons soins d’Ali
Bongo Ondimba via sa gestion scabreuse sous les conseils d’étrangers étranges,
arrogants, incompétents et impopulaires,
il est plus que probable qu’il s’écroule telle une poutre rongée par les
termites au moindre vent politico-social violent.
Et
ce ne sont pas les derniers mots de François Hollande devant la violente vague de changement qui semble s’être
imposée en République Centrafricaine qui pourraient rassurer Ali Bongo Ondimba
qui a certainement oublié qu’en 1964, c’est la France sous les ordres du
général de Gaulle et l’exécution de Jacques Foccart que Léon Mba avait pu
rebondir après le coup d’état militaire pacifique qui avait été opéré par des
patriotes armés. Puis, c’est encore la France sous les ordres de François
Mitterrand et sous l’exécution de Roland Dumas qui avait sauvé le pouvoir du
président Omar Bongo en 1993 quand la rue l’avait presque mis à la porte. Et
enfin, c’est encore la France sous les ordres de Nicolas Sarkozy mais sous les
exécutions de Robert Bourgi et de Claude Guéant qui ont fortement contribué
pour permettre au pouvoir gabonais actuel de s’installer au sommet de l’Etat.
De
ce fait, vouloir sous estimer la force de publique et politique française ou
vouloir narguer ce vieux partenaire stratégique est tout simplement du pur
suicide politique, comme c’est le cas actuellement avec la signature
d’innombrables partenariats, inopportuns et injustifiables à travers le monde
entier, qui brillent d’ailleurs par leur état de mort né. Espérons que le cas
de François Bozizé servira d’étude de cas à Ali Bongo Ondimba et aux étrangers
étranges, arrogants, incompétents et impopulaires trop concentrés à accélérer
l’hémorragie financière de notre pays.
Pour
tenter de s’en sortir, Ali Bongo Ondimba n’a plus d’autres choix que de
convoquer durant son discours de fin d’année, la tenue de la Conférence
Nationale Souveraine et le rétablissement de l’Union Nationale s’il souhaitât
réellement prendre de la hauteur et installer le début d’un climat d’apaisement
afin qu’une rébellion, tant redoutée par les chefs d’Etat, n’explose très
rapidement.
Ceci
étant dit, il ne sera pas inutile de dissoudre cette assemblée nationale
monocolore qui ne devrait rester en marge des grands changements qui lui
éviteront une fin pathétique et peu glorieuse. Ensuite, il devra mettre en
place un gouvernement provisoire qui organisera des élections générales et la
vie de la Cité sur la base des résolutions présentées par la Conférence
Nationale Souveraine. Au quel cas, bonjour les dégâts pour lui et sa légion
étrangère arrogante.
Si
François Bozizé avait eu l’opportunité de recevoir les conseils précités et le
temps de les mettre en application, il aurait pu s’éviter cette chute
vertigineuse à laquelle il est désormais condamnée.
Qu’Ali
Bongo en prenne garde. Certes
comparaison n’est pas raison mais les mêmes causes ont toujours produit les
mêmes effets.
Qui
vivra verra…
Par
Télesphore OBAME NGOMO
Liens utiles:
1. Dépêche AFP sur la situation en République Centrafricaine: François Hollande tord le cou de la Francafrique: http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20121227.OBS3577/centrafrique-paris-fait-proteger-ses-ressortissants-par-l-armee.html
2. Le dialogue reste toujours et encore la seule solution pour sortir d'une crise politique, sociale et économique: http://www.linternaute.com/actualite/depeche/afp/17/1028396/centrafrique_la_france_ne_soutiendra_pas_le_pouvoir_du_president_bozize.shtml
3. Les rebelles du M23 ont appelé patriotiquement Joseph kabila au dialogue le 11 septembre 2012:
4. Film documentaire "Roi du Zaïre": http://www.youtube.com/watch?v=BKMpHiPYPlg
5. Bokassa et sa chute: http://www.youtube.com/watch?v=3zEcJdy-mw8
6. La chute de Laurent Gbagbo: http://www.youtube.com/watch?v=is4tQDmOdZw
7. Assassinat de Robert Gueï: http://www.youtube.com/watch?v=cHh3K4k77wY
8. Discours du Bourget de François Hollande: http://www.youtube.com/watch?v=up62HaC6cFI
9. Interview choc de François Hollande avec France 24, RFI et TV5 Monde: http://www.tv5.org/cms/chaine-francophone/info/Les-dossiers-de-la-redaction/Interview-Francois-Hollande/p-23162-Interview-de-Francois-Hollande.htm
10. Discours d'Ali Bongo Ondimba devant le Parlement: http://koaci.com/articles-77459
11. Fortune mal acquise d'Ali Bongo Ondimba révélée par le service "Finance" de "Yahoo": http://in.finance.yahoo.com/photos/8-of-the-richest-dictators-in-history-slideshow/ali-bongo-ondimba-photo-1348740985.html
12. Le délit de patronyme d'Ali Bongo Ondimba évoqué à France 24: http://www.youtube.com/watch?v=sZ3_9CjMq5Q
13. Robert Bourgi et ses réponses floues sur l'élection anticipée de 2009: http://www.youtube.com/watch?v=4M6vgXwvGJc
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